Traitement des déchets – Les initiatives à Madagascar
Les déchets font partie de la vie quotidienne de la population malgache. Mais la conscience se réveille actuellement pour faire de ces matières organiques des produits qui peuvent être exploités et contribuer au développement du pays.
Survol de la situation à Madagascar
Très peu d’endroits de déchetteries à Madagascar. Bien qu’Antananarivo ait été classée ville la plus insalubre du monde en 2009 par le magazine Forbes, la question est rarement soulevée comme un problème national malgré son impact sur la santé publique et la renommée même du pays sur le plan économique. Il existe une politique de gestion des déchets mais celle-ci n’est pas effective, la situation ne constituant pas une priorité pour le gouvernement. Chaque province possède chacune une décharge à la sortie de la ville et c’est tout, à côté des habitudes de la population d’utiliser la mer et les différents canaux pour jeter les ordure ménagères mélangées avec les sachets en plastique et autres déchets se décomposant à l’air libre, favorisant l’émission de gaz à effet de serre et donc le changement climatique, mais aussi les problèmes liés à la santé de la population.
A Antananarivo, la décharge d’Andralanitra reste le seul endroit pour le dépôt des ordures de la Capitale. Mais la place commence à manquer car elle n’est plus suffisante devant l’accroissement rapide de la population urbaine, le développement de l’industrie et l’urbanisation. Attendues de pied ferme par quelques centaines de familles qui forment le village du père Pedro, plus de 100 tonnes d’ordures par jour provenant de la Capitale sont déversées dans la décharge d’Andralanitra. Elles s’entassent rapidement faute de moyen pour la Commune d’effectuer un ramassage systématique. Près de 1500 litres de carburant sont indispensables quotidiennement avec la hausse du prix du litre, il y a une dizaine de jours.
Toutes les dispositions qui sont prises aujourd’hui insistent sur la nécessité de prendre en compte les conditions précaires dans lesquelles se trouvent ceux qui travaillent dans les décharges publiques, à défaut d’usines de recyclage mais une image qui reflète aussi la pauvreté grandissante de la population. Nombreux vivent de ces déchets. Les questions d’hygiène passent en second plan, à côté de la nécessité de subvenir aux besoins quotidiens des familles. Dans leurs activités, les récupérateurs de déchets travaillent dans des conditions extrêmement difficiles. Les « mpitsindroka » se réservent l’exclusivité sur une des bennes à ordures de la mairie réparties en ville et trient les déchets dans cette benne uniquement. Des centaines de récupérateurs opèrent directement sur la décharge municipale dans les pires conditions sanitaires ils brûlent les ordures la nuit quand les camions-bennes de la Municipalité déposent leur cargaison, afin de « mieux voir les déchets à ramasser » et inhalent en permanence des fumées toxiques. Ces personnes sont à la base de toute une chaîne d’activités qui présentent à sa tête les grandes usines et entreprises oeuvrant dans la récupération et le recyclage de ces matières organiques.
Quelques exemples
Ce sont forcément les coopérations décentralisées ou les organisations non gouvernementales spécialisées dans la protection de l’environnement ou la protection de la santé qui mettent la main à la pâte pour soutenir des efforts de traitements de déchets dans les grandes villes du pays.
L’expérience du compostage
Une entreprise locale du nom de Madacompost vient de conclure un partenariat avec l’association française Gevalor pour valoriser les déchets ménagers et en faire de l’engrais naturel pour l’agriculture. Le site pilote choisi est Mahajanga. Gevalor est spécialisée dans la valorisation des déchets urbains, et les deux partenaires espèrent à terme étendre l’activité sur toute l’étendue du territoire malgache. Il s’agit de changer d’optique dans la manière de voir les déchets ménagers. Ceux-ci ne sont plus les restes dont on doit se débarrasser mais du minerais contenant des produits de valeur à extraire. L’activité est également commerciale. Toute la chaîne de valorisation peut tirer avantage de cette activité qui, jadis, était considérée comme une simple charge publique. Les engrais produits à partir des minerais seront revendus au secteur agricole. L’engouement qui pourrait provenir de cette nouvelle impulsion permettrait de rendre la ville propre. Avec Madacompost, la part organique des déchets ménagers – plus de 70% du total – sert à fabriquer du compost, ensuite utilisé comme engrais naturel par les agriculteurs. Une trentaine de permanents travaillent à Madacompost, ainsi qu’entre 60 et 100 journaliers en fonction des besoins. Le personnel de la décharge a fondé son association, Mihary, afin de financer les frais de scolarité de leurs enfants. A noter que Madacompost se trouve aussi à l’origine de la fabrication de pavés en matière plastique. Le service est en passe de devenir pérenne. Le partenariat Gevalor-Madacompost a obtenu le Prix international Convergences 2015 cette année.
Collecte et valorisation FAKOFIA
FAKO comme « déchets » et FIA, diminutif de « Fianarantsoa ». L’initiative est née suite à la signature de la convention d’exploitation de la collecte et de la valorisation des déchets entre la Commune urbaine de Fianarantsoa et le Relais Madagasikara. Les activités reposent principalement sur la collecte et la valorisation des déchets de la Ville de Fianarantsoa. Deux étapes principales sont enregistrées à savoir la collecte, qui consiste au ramassage des déchets auprès de bacs et le triage au Centre d’Enfouissement technique des déchets où les déchets compostables sont isolés. Mise à part la réalisation d’un compost bio pour les agriculteurs, FAKOFIA s’implique également dans la revalorisation des matières plastiques en les associant avec du sable pour fabriquer des tuiles et des pavés en plastique. Par ailleurs, les bacs à ordure sont entretenus grâce au curage, à la réparation et à la fabrication si besoin est.
Les Nations Unies et Antananarivo
Le programme est nommé « Sécurité humaine » et vise à offrir des conditions de vie décentes aux populations pauvres et vulnérables. Le volet « Prise en charge et gestion des déchets » concerne près de 25 quartiers de la Capitale, soit à peu près 250 000 personnes. Non seulement la collecte, le triage et le recyclage des déchets permettent la création d’emplois, mais les quartiers deviennent actuellement plus propres, plus sains et les maladies sont de plus en plus rares. Dans l’évolution du projet, il s’agit après l’assainissement de la ville d’assurer la sécurité des lieux, de faciliter l’accès aux soins.
L’urgence des pays en voie de développement
Les pays en voie de développement sont les plus exposés à la nécessité de mettre en place une politique de traitement des déchets. Non seulement ces pays sont soumis à l’insalubrité permanente, mais la situation impacte de plus en plus sur les conditions de vie de la population, donnant libre cours aux différentes maladies pour atteindre la santé générale de la population. Les questions du changement climatique ne sont pas nouvelles puisque la dégradation des matières organiques, en l’absence d’oxygène est une conséquence grave, favorisant l’émission de méthane, un gaz à effet de serre 21 fois plus puissant que le gaz carbonique (CO2).
Questions émergentes autour de l’utilisation des déchets en Afrique
Le rapport d’examen africain sur la gestion des déchets soulève les principaux problèmes qui minent les pays d’Afrique dans le traitement des déchets et auxquels les pays comme Madagascar devront trouver une solution afin de remédier à la situation de plus en plus urgente. Il s’agit entre autres des carences en matière de gestion des déchets, notamment la pratique répandue de déversement de ces déchets dans des masses d’eau et dans des décharges sauvages. Les pratiques devenues habituelles aggravent l’état, généralement déplorable, de l’hygiène en Afrique. Le second obstacle porte sur l’urbanisation qui s’accélère dans les pays africains. La tendance est appelée à se poursuivre dans l’avenir dont la préoccupation majeure porte sur les méthodes de planification de l’utilisation des infrastructures et des terres (s’agissant notamment de la gestion des déchets) et cela ne permet pas de faire face à la croissance des zones urbaines (la plus forte du monde, avec un taux d’environ 3,5% par an). C’est particulièrement le cas des bidonvilles, qui occupent une part importante de nombre de villes et localités africaines. Autre frein à la politique de gestion des déchets, il n’existe pratiquement pas d’infrastructures de gestion des déchets dans les zones rurales du continent. Les recommandations des organismes concernés portent sur l’urgence d’améliorer les infrastructures pour endiguer le renchérissement des services sanitaires et, partant, atténuer la pauvreté et réduire l’exode rural.
Par ailleurs, l’écart s’élargit entre les politiques et les législations en matière de gestion des déchets et la façon dont ces déchets sont gérés dans la pratique, en raison de persistantes contraintes de capacité et de l’absence d’installations permettant de gérer les différents flux des déchets. Les importants investissements et le savoir-faire nécessaires pour surmonter les contraintes de capacité demeurent encore hors de portée. Sur le plan économique, la production des déchets augmente considérablement en conséquence de l’industrialisation, de l’urbanisation et de la modernisation de l’agriculture. Le changement de mode de vie et de consommation d’une classe moyenne urbaine croissante, en particulier, augmente la complexité et la diversité des flux des déchets en Afrique.
Finance du carbone
Une des solutions de l’émission de gaz à effet de serre
La finance du carbone est une branche de la finance développée, découlant des mécanismes de marché inclus dans le Protocole de Kyōto. L’objectif est de réduire dans l’atmosphère les émissions de gaz à effet de serre, en favorisant des investissements financiers dans des techniques moins polluantes. Selon le GIEC, les émissions de carbone, venant principalement des énergies fossiles, doivent être stabilisées d’ici 2015 et ensuite réduites. Faute de quoi, les conséquences pourraient être désastreuses. Déjà, dans la situation actuelle, dès 2020, entre 75 et 250 millions de personnes en Afrique souffriront de pénurie d’eau, les habitants des mégapoles d’Asie seront menacés par les inondations des rivières et de la hausse du niveau de la mer, nombre d’espèces vont disparaître en Europe et l’Amérique connaîtra des vagues de chaleur torrides. La conférence de l’ONU organisée à Bali, en Indonésie du 3 au 14 décembre 2007, doit lancer les négociations pour un nouvel accord international sur la réduction des gaz à effet de serre, en remplacement du protocole de Kyoto, expirant en 2012.
Dossier préparé par Lalaina Arisoa