NDLR : Avec les accidents spectaculaires causés par 2 véhicules « Sprinters » vers la fin de la semaine dernière (Route digue et RN7) et celui de lundi dernier sur la RN4, nous vous présentons de nouveau dans cette colonne l’édito du jeudi 03 septembre 2015 dernier. 

Et effectivement, c’est un véritable sprint que les usagers de la route à Madagascar font si l’on se réfère à ces accidents qui font les choux gras de la presse ces derniers temps. Pas plus tard qu’avant-hier, un quotidien de la place a sorti pour sa « Une » la macabre photo d’un accident sur la route nationale 2 où la tête du conducteur d’un taxi-brousse pendait à travers la vitre ! En fait, la voiture qui porte aussi la marque « sprinter » s’est couchée sur son flanc gauche et le chauffeur en question s’est retrouvé coincé sous le véhicule. Une fois qu’on a retourné la voiture, la scène offerte aux passants et aux vacanciers était plus que funèbre. D’après les passagers, le conducteur a voulu savoir ce que valait réellement sa bolide qu’était donc devenu, par la suite, son cercueil. Mais il n’y a pas que lui qui en a payé les frais de cette expérience de mauvais goût puisque l’accident a fait 11 blessés dont plusieurs sont très graves. Ainsi, il se peut que la liste des rappelés dans le Royaume des Cieux ou pour l’enfer ne s’arrêtera pas uniquement là. En tout cas, des vies sont brisées à jamais puisque certains resteront sur des fauteuils roulants le restant de leur jour tandis que d’autres se trouveront ruinés, même si au bout du traitement médical, on trouvera un semblant de guérison aux multiples fractures et blessures. Des familles se trouveront aussi divisées, on sait que pour l’être humain, et spécifiquement dans notre actuelle société où le temps, c’est de l’argent et que l’argent, il n’y en a jamais assez, il est difficile, voire impossible, de supporter longtemps une charge de plus. Le malade ou l’handicapé est très vite laissé à l’abandon et livré à son propre sort d’autant que chacun essaie de survivre en respectant ses obligations professionnelles et autres.

« Voyager est mortel », avons-nous titré dans notre dossier société du jeudi, il y a quelques semaines, et cela semble se justifier de plus en plus. Même pas, diront certains puisque les déplacements urbains présentent aussi d’énormes risques. Pour la journée d’avant-hier à Ambodimita, deux camions se sont télescopés en faisant trois blessés graves dont deux sont des piétons. Apparemment, le fautif, forcément il y en a un, n’a pas pris conscience de l’étroitesse de cette rue puisque lui aussi, a voulu connaître la puissance de son véhicule, d’où une vitesse excessive à l’heure où les riverains sortent pour faire leurs achats de la journée. Et voilà donc deux personnes innocentes qui n’ont rien à avoir avec la circulation urbaine et celle de deux camions mais qui voient leur vie réduite à néant par un inconscient. C’est bien le cas de le dire puisque dès les premières prises en charges médicales, le fautif s’est caché derrière un tas de raisons pour ne pas avoir à sortir de ses poches les frais inhérents dont les diverses consultations et l’achat des médicaments.

Toujours à l’intérieur des grandes agglomérations, les véhicules de transport en commun ont tout simplement un âge … canonique. Après La Havane, Antananarivo possède la plus grande concentration de voitures antiques utilisées comme taxis et taxibe : des milliers de Renault 4L, de Citroën 2cv6, de Mercedes-Benz 409, … soient aussi des milliers de cercueils ambulants. On sait que les histoires des pannes mécaniques et des freins qui lâchent sont légions dans la ville des mille et des morts et blessés sont toujours enregistrés dans ces cas. Pour en revenir aux routes nationales, le mauvais état de la route est constaté partout dans l’île. En réalité, aucune véritable réhabilitation n’a été menée depuis l’avènement du régime actuel et les infrastructures routières ne cessent de se détériorer chaque jour. Et en même temps, les bandits établissent en général autour de ces portions fortement abimées des points d’attaque afin de piller une ou plusieurs voitures. C’est le cas, par exemple, des 60 km reliant Ambohimahasoa et Fianarantsoa, classés « zone rouge » en matière de sécurité routière. Pire, ces attaques ne signifient pas uniquement pillage mais aussi viol et agression si d’autres se terminent pas des meurtres. C’était le cas à Mandoto et dans d’autres villes.

Pour les accidents sur les routes nationales et touchant les véhicules de transport en commun, cela concerne surtout une marque allemande et beaucoup ironisent que prendre une « mercedes sprinter équivaut à faire le … sprint vers l’au-delà » !

Pour le peuple malgache, ce sont plutôt des wagons de pauvreté et de misère que les tenants du pouvoir  actuel l’obligent de prendre.

Jean Luc RAHAGA