En bonne et due forme !
Suivant le classement mondial de cette année 2015, le premier pays où il ferait bon vivre, c’est-à-dire du travail d’abord pour les jeunes et vieux, diplômés ou non, et puis des toilettes dans tous les coins de rue, où la propreté est une réalité mais surtout, où il n’y a pas de délestage, serait un de ces pays européens. Pour le classement de pays par produit intérieur brut, c’est-à-dire qu’il n’y a qu’à claquer les doigts pour tout avoir et où avec le salaire mensuel, on arrive à joindre les deux bouts d’une année, c’est bien sûr les Etats-Unis mais suivis de près par la Chine. Evidemment, le citoyen n’a aucun souci sur le loyer puisque l’appartement ou la villa lui appartient. Pas besoin de se casser aussi la tête sur les écolages des enfants, ni pour la facture de l’eau, de l’électricité et du gaz et surtout pour les ongles de madame, la machine à laver fait l’affaire. Mieux donc, on s’assure de son bien-être physique avec les rendez-vous chez la coiffeuse et les vacances à tous les breaks que le calendrier scolaire des enfants le permet : vacances d’hiver, vacances de la toussaint, vacances de noël, mardi gras, saint-valentin, pâques, pentecôte, fête nationale, et grandes vacances. Bref, une année bien remplie de travail et de plaisir. Si on va prendre une autre statistique de référence internationale, la dernière sortie en date concerne le climat des affaires par lequel on classe les pays du monde entier selon des critères relatifs aux investissements, à la bonne gestion et autre bonne gouvernance de l’administration publique et entre autres, à la rapidité avec laquelle on peut créer une société commerciale, par exemple. Et dans cette catégorisation, Madagascar se trouve parmi les bons … dix derniers et du coup, beaucoup rêvent que l’arnaque, l’escroquerie ainsi que la corruption officielle et officieuse soient bannies à jamais. On aura juste à remplir un formulaire accompagné d’une pièce justificative d’identité et tout est réglé. En un simple clic mais surtout qu’il n’est pas nécessaire de se déplacer et de faire des dizaines de kilomètres dans une ville tellement encombrée qu’absolument, il faut avoir sous main de l’eau et un sachet d’aspirine dans sa voiture. Bien sûr, le pays qui détient le palme dans ce classement cité supra est quelque part dans l’hémisphère nord où la création d’une entreprise se fait en quelques secondes et où il n’est nullement besoin de contact physique pouvant favoriser la corruption active qui commence par ici par la fameuse phrase du « manomeza kely » !
Mais les besoins vitaux de la population, notamment pour les pays pauvres de la planète, sont l’eau et la nourriture, et c’est seulement après que les parents pensent envoyer leurs progénitures à l’école. C’est bien le cas de le dire à Madagascar qui fait des dizaines années de bond en arrière avec un taux d’abandon scolaire élevé et un autre taux de non-réinsertion qui grimpe en flèche. Si la réussite au premier examen officiel du certificat d’études primaires et élémentaires est assez honorable avec un score de l’ordre de 70%, cela veut tout simplement dire que des dizaines de milliers d’enfants de 10 à 15 ans ne vont plus reprendre le chemin de l’école faute de moyens financiers – l’inscription, et à plus forte raison la réinscription, n’est pas du tout gratuite – et seront obligés de labourer la terre – pour ce qui est de garder les vaches, il n’y en a plus à cause des dahalo et du phénomène d’insécurité – ou de migrer vers les grandes villes et grossiront le nombre de marchands illicites chassés par l’administration municipale.
Un autre classement dans lequel on a espéré voir le nom de notre pays figuré dans le peloton de tête, a trait à la sécurité et une fois encore, on est bien déçu. Pourtant, c’est tout à fait normal avec cette campagne d’information faisant suite à l’assassinat de plusieurs ressortissants étrangers mais aussi de violences faites à l’endroit de touristes internationaux. En matière de sécurité, Madagascar est encore une fois dans les fonds du classement et se trouve plus proche des pays en guerre comme la Somalie, la Syrie, l’Irak. Depuis presque deux années, cette chute est vertigineuse où il n’y a plus une région, un district, une commune, un fokontany et un quartier qui n’en sont pas concernés de près. Et pourtant, ce n’est faute d’être averti puisque l’ancien régime a bel et bien réalisé une passation de pouvoir et de service en bonne et due forme. Tous les secteurs d’activité officiels et même officieux ont été revus à la loupe et mieux même, l’ancien Premier ministre Jean Omer Beriziky a laissé la liste de vrais trafiquants de bois de rose. Mais avec la stratégie adoptée de « tout raser pour tout reconstruire », selon le président de la République lui-même, tous les fils se sont emmêlés tandis que d’un autre côté, des catastrophes se sont enchaînées. Et c’est ce qui risque d’arriver pour la Capitale de Madagascar si on ne tient pas compte des avertissements dûment consignés dans les documents laissés par le désormais ancien président de la délégation spéciale de la ville d’Antananarivo. D’où donc son intransigeance à faire une passation en bonne et due forme. Mais apparemment, beaucoup ne l’ont pas compris d’autant que certains sont habitués au hold-up comme le cas du 22 février 2002.
Jean Luc RAHAGA