Projet de loi sur la CENI – Adopté grâce à Jao Vato
85 députés ont voté la loi instituant la commission électorale nationale indépendante mais selon les journalistes venus couvrir l’évènement, on n’en compterait en réalité que 76 députés seulement. Le miracle s’est donc produit. Quelques minutes après le vote, on commençait à parler de … sous !
L’Assemblée Nationale est toujours le théâtre des pires manigances frauduleuses ou corruptives lorsqu’un projet de loi sensible y est présenté. Hier, le projet de loi relatif à la mise en place de la Commission Electorale Nationale Indépendante a été présenté en séance plénière pour adoption et les députés pro-régime ont tout fait pour faire avaler la pilule. Ainsi, c’est presque sans surprise que ce projet de loi ait été adopté d’autant plus que la quasi-totalité des textes y afférent n’ont pas été modifiés. Selon nos constatations, 76 députés étaient présents à l’intérieur du Palais de Tsimbazaza lors du vote, soit un nombre vraiment « juste juste » pour respecter le quorum, nécessaire pour que l’assemblée puisse valablement délibérer. Toutefois, le résultat de l’adoption a laissé place à des questionnements dans la mesure où le décompte a fait état de 85 voix en faveur de la mise en place de la Ceni. Ceci témoigne déjà que le projet de loi a été voté à tort et à travers, voire sans grande réflexion, mais les propos d’un député à la sortie du vote ont prouvé encore une fois que la corruption a régné en maître à l’Assemblée Nationale. En effet, le député Laisoa Jean Pierre, dit Jao Vato (encore lui) a été surpris au téléphone avec un interlocuteur inconnu. Voici ce que nous avons pu entendre : « Le projet de loi a été adopté, prépare 200 millions fmg puis, prépare une enveloppe avec 4 millions de francs, je t’attends avec eux à la cafétéria » (traduction libre). Quelques minutes après, un individu est venu à sa rencontre pour lui remettre une enveloppe de format A4 qui contenait sûrement les 4 millions. Ce qui nous amène donc à souligner que le projet de loi relatif à la mise en place de la Ceni a été adopté contre quelques billets qui n’en valent pourtant pas la peine.
Le Tim à la rescousse du Hvm
Le jeudi 1 octobre dernier, le président du Tiako I Madagasikara Marc Ravalomanana et le président du Hery Vaovao ho an’i Madagasikara Rivo Rakotovao s’étaient entretenus en vue de former une alliance, ou plutôt en vue d’une collaboration. Le leader du Tim avait indiqué ce jour que des arrangements pouvaient se faire si cela concernaient directement leurs intérêts communs. De son côté, Rivo Rakotovao a insinué qu’une coopération avec le Tim dépendrait des députés et de l’adoption sans problème du projet de loi relatif à la mise en place de la Ceni. Hier, la participation des députés élus sous la bannière du Tim à l’adoption du dit projet de loi n’est donc pas étonnante même si depuis plusieurs mois, ces parlementaires avaient endossé une casquette d’opposant au régime. A l’heure actuelle, cette tendance s’est donc inversé et aurait pu être motivée par l’accession du Tim à la mairie de la Commune Urbaine d’Antananarivo. Ainsi, les membres de ce parti compteraient sur leur participation à l’adoption du projet de loi sur la Ceni pour être avantagés par le régime Hvm lors de la mise en place du Sénat. Ainsi, même si le Tim a remporté environ 200 communes lors des dernières élections du 31 juillet et pourrait donc peser lors du vote des 2/3 des membres du Sénat, elle espèrerait en placer plus en comptant sur les nominations du président de la République pour en former le tiers restant. Pour l’instant, l’alliance entre le Tim et le Hvm semble donc être en bonne voie mais les tenants actuels du pouvoir ne doivent pourtant pas oublier qu’ils ont affaire à Marc Ravalomanana.
Toujours une majorité à géométrie variable
Hier, les députés issus de l’Alliance Républicaine de Madagascar n’ont pas participé à la séance d’adoption du projet de loi relatif à la mise en place de la Ceni et là encore, ce n’est pas une grande surprise. En effet, les députés de cette alliance sont rarement présents lors des votes d’adoption, d’abord parce qu’ils sont généralement contre et puis, parce que leur opposition au régime n’est pas réellement prise en considération. En d’autres termes, ils sont toujours mis sur la touche et force est de reconnaître que cela arrange bien les députés pro-régime et les tenants du pouvoir. Toutefois, la vérité sur le soi disant mémorandum de stabilité du président de la république et sur la formation d’une majorité « présidentielle » vient d’éclater au grand jour. Aujourd’hui, nous ne pouvons que constater que la majorité parlementaire n’existe pas réellement à l’Assemblée Nationale. D’abord, le mémorandum n’a pas pu rallier autant de députés que le chef de l’Etat l’aurait souhaité. Ensuite, le projet de loi n’aurait jamais été adopté si les députés du Tim n’y avaient pas participé, députés qui ont toujours clamé ni être au courant, ni être signataire d’un mémorandum concocté par la présidence. En d’autres termes, il est donc tout à fait juste d’indiquer que la majorité à géométrie variable a encore fait ses preuves au palais de Tsimbazaza et pourrait toujours être sujet à des changements selon les grés du vent politique.
Laza Marovola