Sortie de crise – Des doutes sur l’engagement de Chissano
Depuis le dernier sommet de la Sadc à Maputo, l’ancien chef de l’Etat mozambicain – qui reste le médiateur en chef de la communauté internationale dans la résolution de la crise à Madagascar – a fait un retour dans les affaires. Il a notamment rencontré les deux principaux protagonistes de la crise de 2009, Andry Rajoelina à l’Ile Maurice et Marc Ravalomanana en Afrique du Sud. Ce retour a été diversement commenté mais d’une manière générale, il a été accueilli avec un certain pessimisme de la part des principaux acteurs politiques malgaches. Ceux-ci basent notamment leur position sur les résultats plus que « mitigés » des actions entreprises par Chissano quand il dirigeait encore personnellement les négociations.
Si ce pessimisme est si persistant, c’est qu’on doute aussi de la force d’engagement de l’ancien chef de l’Etat dans la résolution de la crise. D’abord, parce que l’homme donne l’impression de se détacher des problèmes malgaches au profit de la résolution des autres crises qui affectent d’autres pays africains. En effet, Joaquim Chissano, tout en restant médiateur dans la crise malgache, avait un moment manifesté sa disponibilité pour résoudre la crise ivoirienne. Pourtant, la Côte-d’Ivoire appartient à une autre organisation sous-régionale, la CEDEAO. Mais au final, il n’a pas pesé bien lourd dans l’évolution politique de ce pays qui a connu une crise d’une dizaine d’années.
Certes, à l’époque, Joaquim Chissano a été éclipsé par d’autres médiateurs comme son « lieutenant » Leonardo Simao et surtout par Marius Fransman. Néanmoins, il avait donné l’impression de s’être désengagé totalement des problèmes malgaches. Pendant des mois, il est entré dans un silence inexpliqué. C’est la raison pour laquelle son retour a constitué une véritable surprise.
Ambigüité
Quoi qu’il en soit, l’homme ne manque pas d’ambigüité dans ses positions. Alors qu’à Madagascar, l’homme semble exprimer une position favorable au retour de l’ancien chef de l’Etat au pays, il n’adopte pas toujours la même position en ce qui concerne d’autres pays en crise. Ainsi, récemment il a exhorté, lors d’une conférence à Cape Town, en Afrique du Sud, à l’émergence d’une nouvelle génération de dirigeants dans les pays africains. S’il a notamment pensé au Zimbabwéen Robert Mugabe, il n’en demeure pas moins qu’il aurait pu s’en inspirer pour la résolution de la crise malgache. Mais au final, tel n’est pas le cas. Cette ambigüité engendre bien sûr une contradiction dans ses activités de médiation à tel point qu’une partie de la communauté internationale doute également de ses capacités de résoudre la crise à Madagascar.
Pour le moment, les Tanzaniens, qui président actuellement la Troïka, n’ont pas encore fourni des explications sur ce retour de Joaquim Chissano. Néanmoins, l’homme est déjà « dans la place » et n’entendrait pas lâcher le dossier malgache, pour le pire ou pour le meilleur.