Profiteurs et mauvais payeurs !
Depuis l’accession au pouvoir de Hery Rajaonarimampianina, les citoyens, et non seulement, les nationalistes de l’Otrikafo et de Madagasikara Afaka, n’ont cessé d’interpeller le régime sur le cas très spécifique des îles éparses. Rappelons-nous que lors de l’Assemblée générale des Nations Unies de l’année dernière, cette question figurait dans l’ordre du jour et le journal que vous tenez en main a, à maintes reprises, sorti plusieurs articles à ce sujet. Non seulement, il est question de la souveraineté nationale mais aussi des richesses sous-marines que la France est en train d’exploiter sans que le vrai propriétaire - selon les résolutions des Nations Unies et surtout selon la délimitation géographique universelle -, à savoir Madagascar donc, soit ni consulté, ni avisé. Et cela ne date pas uniquement de l’année dernière, puisqu’en 2007 et en 2008, la même injonction a été faite à l’endroit du régime de Ravalomanana. Pour cette dernière évocation, c’était du temps où l’auteur de ces lignes était encore journaliste chez le quotidien « La Vérité ». On se rappelle aussi qu’à cette époque-là, l’ancien président de la république avait encore bénéficié du soutien d’une grande partie de la Communauté internationale et pouvait ainsi mener un lobbying mondial pour que la France cède ainsi sans que les Malgaches passent par les rues. A coup sûr, si Marc Ravalomanana a réussi ce pari, il aurait cloué le bec à Andry Rajoelina, puis aurait pu terminer dans la bonne humeur son deuxième mandat tout en devenant le précurseur du troisième mandat en Afrique, à l’instar du burundais Pierre Nkurunziza, du rwandais Paul Kagamé ou encore du congolais Denis Sassou-Nguesso. Comme on dit, c’était manquer de vision alors qu’on sait pertinemment que gouverner, c’est prévoir, et c’est pourquoi l’ancien président a été emporté très vite par le cyclone orange dénommé…. « sassoufit » !
Pour en revenir au régime actuel, Hery Rajaonarimampianina a sagement attendu que la mayonnaise monte pour que, presque simultanément, ce dernier ainsi que son ministre des Affaires étrangères occupent le devant de la scène. Evidemment, Attalah Béatrice a fait rire ceux qui luttent déjà contre la faim – à 20h du soir – pour aller dormir le ventre creux, en informant la presse d’un fait qui s’est déroulé, il y a … 36 ans : « Je suis contente de vous annoncer que selon les résolutions des Nations Unies en 1979, les îles éparses appartiennent à Madagascar ! ». Comme on dit aussi, c’est se f… complètement de la gueule des gens, le peuple malgache, les journalistes, James Ratsima, Andrianjaka et les autres nationalistes en premier. Apparemment, la personnalité est la seule à l’apprendre ces derniers jours, si pour le président de la République en exercice, une conférence de presse qui n’a pas sa raison d’être que de célébrer dès le début de la matinée son anniversaire avec une bonne médiatisation et ce, sans que ce dernier sorte un rond de sa poche, a été organisée. Comme à son habitude, Hery Rajaonarimampianina a parlé pour ne pas dire grand-chose et beaucoup des journalistes présents n’ont rien retenu, même pas le goût du café qui y était servi. L’essentiel est que voilà, le régime – après s’être resté en retrait ou plus exactement, sourd et muet, et de peur de déplaire aux yeux des français – ne suit pas uniquement le mouvement de revendication initié par les nationalistes mais devient du jour au lendemain, meneur et donneur de leçons de diplomatie. Même l’Emmoreg, la force de répression du régime, s’est permis samedi dernier de … louvoyer avec les militants nationalistes tout en encadrant la marche vers l’Hôtel de la ville.
En somme, ce retournement de situation peut être ajouté aux projets présidentiels et Hery Rajaonarimampianina a compris -, apparemment tout seul et sans l’aide de ses conseillers et du président du parti au pouvoir – que cette question des îles éparses est un sujet primordial pour le peuple malgache tout entier et si ce dernier arrive à faire … bouger les lignes, le deuxième mandat pourrait être à sa portée. En parlant des projets présidentiels, voilà une nouvelle révélation qui ternira, à coup sûr, l’image déjà fortement écornée du régime en place : la Société malgache des travaux publics (Smatp) est obligée de continuer la réhabilitation et l’embellissement du « village touristique » de Mahajanga, faute de paiement. Bizarrement, aucun de ces projets n’a vraiment abouti jusqu’ici, et ce, des mois, voire deux années, après leur lancement en grande pompe.
En un mot, on a affaire avec un régime qui sait profiter de toute situation qui pourrait améliorer son image mais quand il s’agit de passer à la caisse, on se défile à une vitesse grand V.
Jean Luc RAHAGA