Exploitation politique des troubles dans le Sud Opportunisme aussi maladroit que coupable
Du sang qui coule, pertes de vies humaines, saccages de hameaux pour pillages et par le feu, abandon de leur habitation par des populations paniquées à raison par une terreur d’être prises en tenailles entre la sauvagerie des uns et les brutalités des autres, cavalcades de troupeaux entiers poussés on ne sait plus si c’est par les voleurs ou par leurs poursuivants… Des scènes d’horreur dont personne ne cherche à en nier la réalité.
Cette situation soulève naturellement une grande émotion, et interpelle la conscience nationale. Manifestement le droit ne suffit plus à faire loi pour abriter sous ses ailes les personnes et les biens, la situation n’est plus à la normale. Quand les circonstances ne permettent plus à s’arrêter sur chacune des morts brutales ni pour en éclaircir les conditions ni pour en déterminer les responsabilités, c’est que l’on se trouve de facto dans un « état d’exception ». Décréter l’état d’exception aurait conduit à reconnaître une sorte de situation de guerre, aurait soulevé bien des émois politiques et par là-même, pas mal d’exploitation abusive, mais aurait paré à l’avance à l’opportunisme coupable de jeter encore plus de tumultes sur une réalité suffisamment trouble. Verser des pleurs mélodramatiques sur ce qui est déjà une tragédie nationale en soi, tout en lorgnant sur un effet politique escompté, se moule bien dans l’opportunisme qualifié de « manararao-paty ».
Les informations qui ne font écho parfois qu’à de simples rumeurs rapportent dans le lot un nombre élevé de débordements autant réels que virtuels. La situation a de quoi alarmer les organisations « droitdelhommistes ». Celles-ci s’en émeuvent à raison dans le registre qui cadre à leur noble et indispensable rôle. La réponse que le gouvernement leur a donnée relève elle aussi sûrement d’un réalisme frappé au bon coin de l’objectivité. S’agissant de donner une appréciation sur la réalité de la situation, autant authentifier les infos par des constats de visu ou au moins d’écoute de première main sur terrain, plutôt que baser une condamnation à partir des « on-dit ».
C’est que de racontars et de fables dans le lot il en existe. La réalité oblige à reconnaitre un Remenabila , ou insaisissable, ou tout simplement introuvable car inexistant. Tout ce qui touche ce personnage se rapporte à une sorte de « chanson » (au sens médiéval) dont le propre est de s’alimenter aux portes de la légende. Que l’on annonce sa capture comme éminente, ça fait partie des règles de la communication, même si on peut en rire de la stratégie ainsi adoptée. Que des politiciens tentent de s’accaparer le monopole de l’émoi national, et relaient comme vérité la raison de la « folie Remenabila », dans une simple idée de vengeance contre « des barons » pour une histoire maffieuse, ça fait désordre. La démarche, cousue de fil blanc uniquement dans l’intention de salir les hauts responsables de l’Etat, se réduit à n’être qu’une bassesse d’une vile tactique politicienne à vouloir d’une tragédie nationale tirer profit partisan. Les larmes de crocodile de politiciens, chercheurs d’or (au sens réel) dans le Sud ne leurrent personne. Ni l’ostentation d’une posture religieuse ni l’indécent étalage d’une sensiblerie nationaliste ne sauraient séduire par-dessus le populisme d’un discours creux auquel les esprits fragiles pourraient accorder un bonus à cause du ton mélo racoleur propre à tirer des larmes aux midinettes et autres âmes de grande sensiblerie.
Léon Razafitrimo