Banalisation de l’insécurité, prime à la pauvreté familière
Des dahalo ont attaqué un convoi de taxis-brousse et, pour réussir l’opération, n’ont pas hésité à tirer sur le chauffeur du véhicule qui ouvrait la route. La relation de la scène est fidèle au déroulement réel du drame, seulement à proprement parler il ne s’était pas agi de dahalo en l’occurrence. Les gens du Sud sont marris de l’usage abusif que l’on fait du terme dahalo, terme qu’ils réservent pour désigner les voleurs de zébus. La langue malgache recèle d’une panoplie de mots autres que dahalo pour parler de brigands, de bandits et autres malfaiteurs. C’est qu’avec tous les événements dans le Sud, plutôt qu’à recourir à des nuances entre malaso, jiolahy, tontakely, soit par facilité ou pour être dans le coup, on utilise le mot « in » de l’actualité, dahalo. Une manière d’exorciser aussi tout ce qui se passe. Le climat diffère certes, mais les modes opératoires des gangs de bandits dans les villes ou ceux des brigands des grands chemins n’ont rien à envier en violence aux raids pleins de sauvagerie que mènent les pseudo dahalo actuels. Il n’est sans doute pas de cruauté moins terrorisante qu’une autre. On aurait pu croire que tous ces malfaiteurs manifestent violence pour terroriser dans l’immédiat leurs victimes et s’assurer ainsi de leur docilité pendant qu’ils opèrent. Or avec le temps on a de plus en plus le sentiment face à l’escalade de violence et à un débordement d’imagination pour exercer des formes de sadisme, que tous rivalisent pour semer un climat de terreur et que certains trouvent plaisir à faire des cartons et à faucher des vies. Un haut responsable de la sécurité et de l’ordre public condamne de façon sévère l’opinion publique qui tend selon lui à culpabiliser injustement les forces armées et de l’ordre. La situation est telle qu’elle se présente parce que l’Etat accuse une réelle faiblesse pour mille et une raisons qui, si on les détaille, remuent des débats politiques. La population refuse sans doute de s’y mêler, déjà qu’actuellement règne une cacophonie de tous les bavards qui davantage rivalisent de tons doctes qu’ils ne veulent passer à l’action. Le simple pékin réagit au premier degré, il ne connaît de responsable de l’ordre et de la sécurité que celui qu’il voit porter képi. La situation s’aggraverait encore lorsque les gens auront cessé de culpabiliser les responsables de l’ordre et de la sécurité, c’est qu’ils auront fini de croire en la mission de ceux-ci, et alors s’installerait un système d’autodéfense, une ouverture à l’anarchie qui ne peut que faire le lit à la loi de la jungle. Confisquer au peuple son droit de décision, tout à la fois charger la population des rôles que l’Etat ne saurait plus assumer, procèdent à inverser les principes mêmes qui sont les fondements de la République.
Léon Razafitrimo