… il revient au galop !
Tout le monde aura sûrement déjà deviné le début de ce proverbe. Il aurait été plus facile et plus simple de mettre plutôt le début à la place, et ce n’est nullement qu’on soit anticonformiste. Quelques fois juste, il est nécessaire de changer d’air, de registre pour ne pas s’enliser dans la routine. Déjà qu’on vit un quotidien mortel et ponctué de ces même choses du lever jusqu’au coucher, on ne va pas en parler chaque jour que Dieu fait. Comme on disait donc, il est nécessaire quelques fois de prendre l’air, de respirer autre chose et pourquoi pas s’envoler vers d’autres cieux si on en a les moyens. D’ailleurs, la période préféré de l’élève studieux approche : celle des vacances. Mais d’abord, il faut passer les examens officiels, sinon les examens finaux pour passer à la classe supérieure. A l’approche des vacances, il est donc normal que l’appel de la mer et des voyages se fasse sentir. Et à dire vrai, il n’y a pas que les élèves studieux qui le sente. Tout le monde, grands et petits ; parents et enfants ; tout le monde rêve de vacances et de décrocher de cette routine abominable de la corruption, des grèves et des revendications insatisfaites. Et c’est bien normal car « Tout le monde a peur du quotidien, comme s’il s’agissait d’une fatalité qui développe l’ennui, l’habitude », disait Marc Levy. Pour nous, c’est pire car ce n’est ni l’ennui ni l’habitude mais quelque chose de pire encore. Surtout quand on se trouve dans l’une des 33 villes au monde où les conditions de vie de la population sont les plus déplorables.
Mais pour l’heure, seuls quelques chanceux peuvent se le permettre, une poignée de gens qui ont comme gagné à la loterie. Les autres sont obligés de lutter pour survivre durant les vacances qui s’annoncent froides. Ces chanceux, ce sont les mêmes qu’il y a quelques années à peine. Et comme il est de coutume chez eux, c’est dans les moments où le pays se trouve le plus vulnérable que les voyages doivent s’enchainer. En effet, plus que jamais, les rumeurs sur un possible coup d’Etat se sont fait entendre partout. Plus que jamais, la pauvreté fait rage, les scandales de corruptions et de trafics en tout genre font les unes de la presse. Et comme par hasard, alors qu’ils se sont arrêtés pour un temps, voilà qu’au même moment, les voyages à l’étranger reviennent à la mode pour ces chanceux. Parait-il que l’un d’eux ou plutôt l’une a été vu au salon de l’aéroport en partance vers la France alors que l’un allait débarquer en terre malgache le soir même de retour de Singapour. En plus de la passion pour les voyages qui revient donc, il semble que maintenant, on voyage séparément. Alors qu’auparavant, la petite famille était inséparable et que même les nounous devaient être présentes. Ce n’est plus le cas actuellement ? On est bien en droit de se le demander car tout bon citoyen se doit de s’informer sur les affaires de son pays, ne serait-ce qu’un tout petit peu. Maintenant que tout le monde voyage seul, et comme une fois n’est pas coutume, on se demande vraiment pourquoi. D’autant plus que quelques rumeurs se sont déjà faites persistantes, il y a de cela quelques temps. Bref, on s’égare tellement il y a d’interrogations dans cette vie. La fièvre des grands voyages a donc de nouveau frappé ces veinards. Car aussitôt arrivé, aussitôt parti, comme le pays n’a jamais été qu’une terre d’escale. Il a été officiellement annoncé que « Le Président de la République a quitté le pays pour se rendre en Turquie à l’occasion du Sommet humanitaire mondial qui se déroulera les 23 et 24 mai à Istanbul. ». Istanbul, une destination de rêve que l’on n’aura la chance de voir que dans les pubs d’Euronews. En effet, la Turquie fait bien la publicité pour son tourisme, et ça se fait à l’échelle mondiale. Pourtant, des chanceux ont réussi à décrocher un billet en partance pour la Turquie, peut-être même aux frais de Turkish Airlines qui vient de conquérir sous peu nos cieux. De plus, ces gens-là sont partis pour la bonne cause : celle humanitaire. Ne savent-ils pas qu’à Madagascar, il y a plus urgent et plus à faire dans le domaine humanitaire qu’à Istanbul ? De toute façon, malgré ce déplacement, on sait déjà que personne ne va plaider la cause malgache là-bas. Tout simplement parce que dans ces voyages là, on ne s’aventure pas à parler du pauvre pays d’où l’on vient. On fait mine d’appartenir à la haute société qui discutaille et se serre la main, puis fait des discours. Personne ne va plaider cette cause – perdue – comme ça a été le cas à Singapour où aucun mot sur le trafic des richesses nationales n’a été dit. Comme ça a été partout ailleurs et comme ça le sera toujours lors de ces grands voyages.
En somme, la formule voyage est de nouveau à la carte. Sauf qu’elle est maintenant bien assaisonnée avec du « pas ensemble » et servie chaude pour ne plus perdre du temps à s’attendre sur le quai. Ce qui confirme bien cet adage qui disait quoi déjà ? … Ah oui, «chassez le naturel, il revient au galop » !
Ny Aina Rahaga