Sanctions européennes – Plus efficaces, selon Ping
Dans une interview qu’a accordée il y a quelques temps Jean Ping à une doctorante de l’Université de Paris-Sud, Delphine Compaoré, l’ancien président de la Commission de l’Union africaine s’est penché sur l’incapacité de l’organisation panafricaine de résoudre les crises qui affectent plusieurs pays du continent dont Madagascar. Pour lui, les sanctions contre les hommes politiques ayant commis un changement anticonstitutionnel de régime sont inefficaces tant que la communauté internationale ne les soutient pas. Et dans le cas de Madagascar, il estime que la récente prise de position de l’Europe pourrait affecter les dirigeants transitoires et les pousser à des concessions importantes.
« Nous avons des problèmes africains, il faut des solutions africaines, sans pour autant écarter la participation étrangère, elle est nécessaire. Je vais vous donner un petit cas : lorsque nous disons que nous allons mettre Madagascar sous sanction, Madagascar se considère un peu comme un pays à part et les Malgaches nous disent en off, « on n’en souffrira pas » », a notamment soutenu Jean Ping. Sur ce point, l’ancien président de la Commission avance en terrain connu dans la mesure où dans sa jeunesse l’homme a déjà passé un long séjour dans le pays – d’ailleurs, il maitrise encore quelques bribes de la langue malgache.
Agoa…
Pour l’ancien numéro Un de l’Union africaine, « lorsque nous (les Africains, ndlr) décidons des sanctions, nous mettons en place un groupe international de contact à qui nous disons de nous accompagner dans les sanctions. Les Etats-Unis ont été les premiers. Madagascar ne s’en sortira pas. Ce sont des dizaines de milliers de gens au chômage parce qu’ils ont arrêté l’Agoa, c’est l’aide à l’exploitation des produits textiles vers les Etats Unis. Lorsque nous disons interdiction de voyage, ils s’en fichent ils ne viennent pas en Afrique, ils vont en Europe. Mais si on ne leur donne pas les visas là-bas, ça commence à faire mal ». La récente décision de la France de ne plus accorder de visa de séjour aux personnalités qu’elle considère comme des éléments de blocage à la sortie de crise peut être ainsi analysée à l’aune de cette affirmation de Jean Ping. D’autant que cette position a été largement adoptée par les pays membres du Gic-M. On s’attend à ce que l’Europe prenne également les mêmes sanctions.
Concernant les autres sanctions décidées par la réunion du Gic-M à Addis-Abeba et en particulier le gel des avoirs de certains hommes politiques, l’analyse de Jean Ping reste encore pertinente notamment quand il s’agit de faire fléchir les positions intransigeantes. « Lorsque nous disons vos comptes en banque seront gelés. Ils n’ont pas de comptes en banque en Afrique ; ils ont leurs comptes en banque en Europe. L’effet, le fait de nous faire appuyer dans les décisions que nous prenons par le reste du monde, ce sont vos valeurs que nous avons acceptées et que nous défendons. Certains Etats ne jouent pas le jeu, pas clairement, mais dans l’ensemble ça nous permet d’avancer avec eux », a-t-il conclu sur la crise à Madagascar.