Loi sur la lutte contre la corruption – Discutable et non conforme à la Constitution
Une fois n’est pas coutume, cette fois, la Haute Cour Constitutionnelle de Jean Eric Rakotoarisoa n’a pas ménagé l’exécutif et le parlement. En effet, jusqu’ici, parmi les projets de loi qui ont été votés par le parlement et ont dû être soumis au contrôle de constitutionnalité, peu nombreux sont ceux qui ont passé la vérification à 100%. A l’instar de la loi n°2016-021 sur les pôles anti-corruption déclarée conforme dans son intégralité à la Constitution, la loi 2016-020 sur la lutte contre la corruption elle-même va devoir être revue. Un cas semblable donc à la loi n° 2016-006 portant organisations et attributions du haut conseil de la défense nationale. Ainsi, pour ce qu’il en est de cette loi 2016-020, il semble qu’elle comporte énormément d’imperfection et d’anomalies, en ne prenant pas en compte les dispositions constitutionnelles. Le principal souci se trouve dans l’article 9 de ladite loi qui concerne l’obligation de déclaration de patrimoine des hautes personnalités et des hauts fonctionnaires ainsi que les modalités à suivre relatives à cette obligation. Mais aussi, dans sa décision, en les considérants 19, 24, 25 et 26 de sa décision, la Haute Cour Constitutionnelle relève plusieurs lacunes concernant cette loi. C’est par exemple le cas des dispositions concernant la protection des témoins qui a été jugé insuffisant se limitant tout juste à la personne du témoin.
Essai technique
Selon la Hcc : « Considérant que la loi n°2016 – 020 relative à la lutte contre la corruption prévoit des clauses de protection des témoins et dénonciateurs en ses articles 56 à 58; que ces clauses sont incomplètes par rapport aux exigences de l’article 32 de la Convention des Nations Unies ; qu’elles n’incluent ni les victimes, ni les parents et d’autres personnes qui sont proches des témoins parmi les personnes à protéger; qu’une mise en place d’une structure chargée de cette protection , de ce fait, s’impose(…)». Plusieurs dispositions de cette loi mais aussi plusieurs autres lois qui ont été votées par le parlement lors de la session ordinaire puis lors de cette session improvisée se heurtent aux mêmes problèmes. Car comme l’évoque le considérant 24 de la décision n°28-HCC/D3 du 05 août 2016 Concernant la loi n° 2016-020 sur la lutte contre la corruption de la Hcc, certaines dispositions de la loi, en plus d’être inconstitutionnelles, ne prennent en compte aucune des traités internationaux que le pays a pourtant ratifié dont la Convention des Nations Unies. Il est aberrant que des lois votées par les deux Chambres du parlement foulent ainsi des dispositions constitutionnelles et des chartes internationales. A se demander si le parlement malagasy est encore en ce moment dans la période des essais techniques. Ne sachant même pas de quoi il en retourne concernant les lois qu’ils votent. Car ce n’est pas la première fois depuis cette 4ème République qu’on assiste à des absurdités pareilles, et ce n’est sûrement pas la dernière non plus.
Régis Kabary