Il fait partie des humoristes malgaches ayant su imposer son style d’écriture et son look. On se souvient de cet homme avec son « milibandy » et chapeau de paille Betsileo… Effectivement, c’est de Francis Turbo ou Francis Razafiarison dont on parle, le quinquagénaire qui fait rire les plus vieux et les tout-petits depuis maintenant plus d’une vingtaine d’années. Rares sont les comédiens qui arrivent à tenir aussi longtemps, surtout quand on pense embrasser une carrière d’humoriste.

Madagascar Matin (MM) : Comment êtes-vous devenu un humoriste ?

Francis Turbo (FT) : En réalité, je suis devenu un amuseur par hasard. Au début, l’idée de devenir un comique ne m’est jamais passé par la tête, d’autant plus j’étais très timide durant mon adolescence. Grâce à Fara Raharijaona, une amie connue sur les bancs de l’Université qui admirait beaucoup mon sens de l’humour, et m’ayant présenté à son aîné, Noël Raharijaona, je me suis retrouvé sur la même scène que Njakatiana et Parson Jacques lors d’un concert durant lequel j’étais l’animateur. Ce premier pas fut un coup de maître. Effectivement, cette soirée mémorable, pour ma carrière, m’a donné le déclic final. C’était en 1990. J’ai gagné la somme de 25 000 francs malagasy, ce qui était assez conséquente à cette époque, vu que ma propre bourse d’études mensuelle était de 34 500 francs malagasy. Pour moi, c’était une expérience qui m’était essentielle pour comprendre la vraie valeur de l’humour. Turbo continua ensuite son bonhomme de chemin en tant qu’animateur puis humoriste accompli. Puis, les portes se sont ouvertes pour lui : sur les mêmes planches que Niry Ravelojaona, de Lil’s Music pour animation d’une soirée à l’Hôtel Hilton. Ce dernier m’a ensuite emmené au sein de la Rnm et de la Tvm pour animer une émission aux côtés de Nicolas Ratsimandresy dans Avoria. De là, Turbo en tant que Turbo a vraiment démarré en trombe.

MM : Beaucoup vous considèrent toujours comme un insolent… l’êtes-vous quotidiennement ?

FT : Beaucoup ne voudront pas me croire mais je suis un vrai timide. Incroyable, mais c’est pourtant vrai ! Derrière cet homme insolent, comme vous le dites et qui parle de choses considérées comme « tabous » notamment le sexe, se cache un homme timide et sérieux. C’est en quelque sorte l’humour qui a permis de me lâcher en public et vaincre ma timidité. Aujourd’hui, je suis marié et père de quatre filles dont deux jumelles, je suis surtout un père protecteur et aussi sévère. Sur scène, je me lâche et je parle de tout, presque sans aucune retenue et c’est d’ailleurs ce qui fait rire les bons vivants et les moins heureux. Pourtant, quand je ne suis pas sur scène, un tout autre homme prend place, celui d’un papa dévoué.

MM : Pouvez-vous nous parler de vos passions ?

FT : En dehors du travail, je suis aussi un amoureux de jardinage. Dans mon jardin, je fais pousser un peu de tout : arbres fruitiers, potagers, fleurs et bien d’autres. Une passion qui vient probablement de mon parcours. En effet, je suis bachelier technique agricole et géographe de formation. Avant de me consacrer définitivement à l’humour et à l’animation, j’étais photo-interprète et travaillait pour le plan de gestion du terroir à Ambatolampy dans les années 90. Mais ce n’est pas tout, je me suis également pris de passion pour la photographie, dans les années 80 pendant que j’effectuais le Sn ou service national. Avec l’appareil photo de mon père, je prenais en photo tout ce que je voyais. Ne se vantant ni se plaçant comme un professionnel en la matière, j’ai déjà effectué une exposition dans les locaux d’El Pili Pili. Jusqu’à maintenant, quelques-unes de mes œuvres sont exposées en permanence à la buvette de la Bibliothèque nationale Anosy.

MM : Des conseils pour les jeunes humoristes ?

FT : Sept albums audio et un disque de chansons de variété à mon actif avec des tournées internationale et nationale dans les 6 provinces, les 22 régions, ainsi que plusieurs districts, je crois que je suis mieux placé pour donner des conseils aux jeunes humoristes qui veulent percer dans ce monde.  Selon mon propre point de vue, je pense qu’avoir une  bonne base est la clé de la réussite dans une carrière et quel que soit le métier en question. C’est plus valorisant pour le métier que l’on choisit, et surtout, une bonne culture générale est une clef passe-partout, pour accéder aux spécialisations. Et puis, de la discipline, une bonne éthique et déontologie, beaucoup de travail, de patience et de persévérance. Ceux qui voudront devenir un professionnel dans le monde humoristique devront ainsi beaucoup travailler et surtout bien se cultiver. Avoir un sens de l’innovation, sans copier les autres, est aussi un atout.

MM : 26 ans de scène à célébrer. Comment ça va se passer ?

FT : Effectivement, cette année, je célèbre mes 26 ans de carrière en tant qu’humoriste. Pour marquer d’une pierre blanche cet évènement, LH pro organise un spectacle qui se déroulera ce dimanche 21 août à Antsahamanitra et s’intitule « 26 taona naha Turbo an’i Françis ». Pour l’occasion, je présenterais les sketches qui ont marqué mes débuts notamment « Esy e ilay halina e », jusqu’à mon dernier numéro « Andriamanitra o ! Inona ary ity ». Ces numéros s’étaleront sur différents thèmes notamment la vie quotidienne des malgaches, l’amour, la technologie, la religion pimentée, bien sûr, des blagues plus ou moins salées. Effectivement, au cours de ces 26 ans, j’ai eu l’occasion de créer de nombreux sketches dont certains ont été joués sur scène mais n’ont été enregistrés dans aucun support. Pour le spectacle, je vais présenter quelques-uns de ces numéros inédits. Comme on l’a vu depuis quelques temps, le clip « Rafotsy be » passe sur les médias. La musique sera aussi au programme pour ce rendez-vous exceptionnel, sans oublier le champagne et le gâteau.

 Tahiana Andrianiaina