A l’épreuve du temps
Plus rien ne semble pouvoir surprendre les gens, quelle que soit la décision qu’adopte la nouvelle Cour Electorale Spéciale, l’opinion ne s’en émouvra pas. La Cour est condamnée pourtant à statuer de façon extrémiste : si elle venait à rayer de la nouvelle liste les noms des personnes dont la candidature est indésirable au regard de la communauté internationale, on dirait que c’est une cour croupion, si à l’inverse elle ne fait que confirmer la liste des 41, nombreux estimeraient la décision téméraire quant à l’avenir du pays. Ce n’est pas que de cette décision à l’avance l’opinion ne s’en soucie pas, elle se satisfait d’émettre des critiques, sachant pertinemment que ça n’aura aucune influence sur la marche des événements. Et pourtant la décision que va adopter cette nouvelle cour aura une grande importance et nécessairement la cour prendra des risques. Les pressions qui s’exercent sur elle en appellent toutes à la loi. Mais de quelle loi s’agit-il, faut-il faire référence à la loi votée de manière circonstancielle destinée uniquement à la résolution de ce cas, ou à la loi qui scelle la liste précédente de l’estampille de l’autorité de la chose jugée. L’attente s’éternise tant que certains candidats ont fini par s’y croire (président pardi) ! Très spécifique leur style de faire des déclarations sur ce sujet. Il est certes de leur droit d’émettre leur avis à ce propos, mais leur manière de le faire ressemble davantage à des conseils voire à des conclusions qu’ils adressent à la Cour. De quoi se méfier si ces gens-là accèdent à la fonction, à l’avance ils sont déjà détenteurs de la « vérité immanente » qui s’annonce comme constitutive de la « pensée unique » de demain si d’aventure la feuille de maïs qui aujourd’hui crisse se transformait en billet de banque tout neuf avec son crissement caractéristique. L’essentiel de ce que la population attend du prochain président se résume à la sagesse. La sagesse peut-elle pourtant être sans une humilité authentique ? C’est que ce public bon-enfant tend à devenir bon juge et se fait rapidement une idée des petits prétentieux « monsieur je sais tout et mieux que vous ». Ouah ! Ouah ! Déjà les petits roquets se moussent à croire que rien que le fait d’être candidats leur donne une stature à avoir la science infuse, qu’en serait-il si d’aventure l’un d’eux venait à enfiler les habits de président. Contre mauvaise fortune il faut faire bon cœur, et si l’on doit positiver ces moments perdus, on peut s’en féliciter du fait que cette période a donné le temps d’observer à loisir les candidats, le temps utile afin que l’impatience et l’excitation parviennent à pousser certains à la faute, de simples petits travers mais o combien révélateurs.
Léon Razafitrimo