Corridor forestier Marojejy-Anjanaharibe Sud-Tsaratanana – Devenu une aire protégée !
Septembre est un mois riche pour le paysage des Hautes Terres du Nord de Madagascar. Le corridor forestier Marojejy-Anjanaharibe sud-Tsaratànana (Comatsa) devient officiellement une aire protégée le 14 septembre, lors d’une cérémonie organisée à Manambery. 11 nouveaux contrats de transfert de gestion des ressources naturelles (Tgrn) sont signés le 15 septembre à Andrafainkona, pour consolider la ceinture verte qui entoure le Comatsa.
Une aire protégée aux valeurs socio-économiques
Le Comatsa fait partie de la deuxième plus grande aire protégée terrestre de Madagascar qu’est le Complexe des Aires Protégées Ambohimirahavavy-Marivorahona (Capam) qui s’étend sur 537 465 ha. La superficie du Comatsa est de 318 087 ha. De par ses catégories V et VI, le corridor offre un cadre de gestion qui favorise l’implication des communautés locales.
Cette deuxième plus grande aire protégée (Ap) terrestre de Madagascar a été mise en place en 2015. Elle est composée de plusieurs Ap dont le Comatsa, la Réserve Naturelle Intégrale de Tsaratanàna, les aires protégées de Bemanevika et Mahimborondro. Ces aires protégées constituent un des plus grands blocs de forêts humides à Madagascar et assurent l’approvisionnement en eau de la Sava et de la Sofia, ainsi qu’une partie de Diana grâce aux six grandes rivières qui y prennent source. De nombreuses cultures vivrières, notamment la riziculture irriguée et les cultures de rentes, dépendent de ce grand réservoir hydrographique naturel. «C’est dire que l’économie régionale est intimement tributaire de ces aires protégées, qui soutiennent les conditions de vie de dizaines de milliers de ménages. Ainsi, ces forêts ne sont pas uniquement précieuses en termes écologiques mais aussi par leurs valeurs socio-économiques», explique Nanie Ratsifandrihamanana, Directeur Pays du Wwf Madagascar.
La mise en place de l’aire protégée Comatsa est réalisée grâce à la collaboration du Ministère de l’Environnement, de l’Ecologie et des Forêts, du Wwf et du Gef/Pnud qui en assure le financement.
L’implication des communautés, condition de réussite
La responsabilisation des communautés locales dans la gestion forestière est une étape importante pour que la protection des sites de biodiversité soit efficace et effective. Auparavant, 53 transferts de gestion étaient réalisés autour du Comatsa. Ils représentent plus de 4 000 personnes issues des communautés de base et couvrent 148 504 ha de forêts.
Le transfert des 11 nouveaux contrats est issu d’une étude préliminaire de la Direction Forestière (Dreef) de la région de la Sava, dans cette partie Nord de Madagascar. En effet, ces Tgrn constituent une ceinture verte qui permettra de sauvegarder environ 28 105 ha des massifs forestiers les plus reculés dans la partie nord du complexe Ambohimirahavavy-Marivorahona.
L’implication des communautés villageoises, qui restent les premiers bénéficiaires de ces terroirs naturels, est cruciale pour la protection de ces forêts dans la mesure où le service forestier ne peut assurer seul la gestion de ces ressources.
Chaque communauté contractante bénéficie d’un encadrement technique ainsi que des formations pour qu’elle puisse s’acquitter de ses responsabilités de gestionnaire : maîtrise des exigences du cahier de charges, réalisations des activités de conservation et de gestion dans les unités de zonages et mises en œuvre des plans d’aménagements.
Une convention tripartite pour une meilleure gestion forestière
Le transfert de gestion d’une forêt est un contrat entre l’Etat, représenté par la Direction Régionale de l’Environnement, de l’Ecologie et des Forêts, la commune concernée et la communauté, régie par la loi Gelose (no. 96-025) ou le Gcf (Décret n°2001-122). Il comprend, entre autres, la gestion des droits d’usage et l’exploitation des ressources conformément au plan d’aménagement, avec une règlementation qui rend plus rationnelle l’usage des services écologiques de la forêt. En effet, les membres de l’association contractante peuvent collecter des produits forestiers secondaires à des fins d’alimentation, cosmétiques, médicinales ou culturelles, selon les limites d’un règlement défini dans le plan d’aménagement.
Le Tgrn est une approche qui facilite l’implication et la responsabilisation des villageois dans la gestion durable des ressources forestières, tout en aidant le service forestier à assurer son rôle. Outre la protection des terroirs, des activités génératrices de revenus sont mises en place pour réduire la dépendance des communautés vis-à-vis de la forêt et assurer leur autonomie quotidienne. Manantsoa Andriantahina, Leader Paysage des Hautes Terres du Nord, zone d’intervention de Wwf à Madagascar souligne : «Il est important d’accompagner les communautés, pour que leurs engagements se fassent dans les meilleures conditions. Nous organisons plusieurs formations afin de faciliter l’imprégnation. Alphabétisation fonctionnelle, tenue de comptes et trésorerie, gestion associative, formations aux nouvelles techniques culturales : autant d’appuis qui aident les communautés à se responsabiliser rapidement et efficacement et maîtriser leurs contrats de gestion».
Un contrôle du service forestier se fait régulièrement auprès des communautés. Dans trois ans, prochaine période d’évaluation de ces nouveaux Tgrn, les villageois pourront démontrer leur savoir-faire et leur implication pour la conservation et la gestion rationnelle des forêts.
Recueillis par FR