Chili – La socialiste Michelle Bachelet de retour à la présidence
Une victoire écrasante et sans surprise. C’est avec un peu plus de 62% des suffrages que la socialiste Michelle Bachelet a été élue à nouveau présidente du Chili, devant la conservatrice Evelyn Matthei. Appréciée de ses compatriotes pour son style chaleureux, la candidate de centre gauche, pédiatre de formation, a déjà dirigé le pays de 2006 à 2010. Elle est la première ex-présidente à remporter un deuxième mandat en plus de soixante ans. Sa rivale, Evelyn Matthei, 60 ans, n’a obtenu que 38% des voix, la plus mauvaise performance de la droite depuis deux décennies. L’ex-ministre du travail, investie tardivement après une cascade de retraits de leaders conservateurs, avait reconnu qu’une victoire face à la candidate socialiste relèverait du « miracle ». L’abstention, qui avait dépassé les 50% au premier tour, a toutefois de nouveau été importante. Un bémol qui n’a pas entamé la joie des soutiens de Michelle Bachelet. Le « Chili s’est regardé lui-même, sa trajectoire, son passé récent, ses blessures, ses gestes, le travail encore à faire. Et il a décidé qu’il était temps de mener des changements de fond », a déclaré la présidente socialiste à la tribune, devant des milliers de partisans enthousiastes à Santiago. « Ça ne va pas être facile, mais quand a-t-il été facile de changer le monde pour l’améliorer ? ». Elle a insisté sur l’urgence à construire un « Chili plus juste » et promis que « plus jamais une minorité ne fera taire la majorité ».
Cinquante réformes en cent jours
Au cours de sa campagne, Michelle Bachelet a promis de mettre en marche dans les cent jours après son élection un ambitieux programme de cinquante réformes, fondé notamment sur une révision de la Constitution de 1980, héritée de la dictature. Une réforme fiscale, avec une hausse de l’impôt sur le bénéfice des sociétés de l’ordre de 8 milliards de dollars (3% du produit intérieur brut), doit aussi permettre une refondation du système éducatif pour instaurer une instruction publique de qualité, l’amélioration du système de santé et des services publics. La nouvelle présidente du Chili hérite d’un pays un peu essoufflé par le ralentissement de l’économie mondiale, un recul des investissements et la baisse des prix du cuivre, dont il est le premier producteur au monde. Mais l’économie chilienne reste solide, avec une croissance entre 3,75 et 4,75% prévue pour 2014. Le revenu par habitant a dépassé le seuil des 20 000 dollars, ce qui en fait le plus élevé d’Amérique latine. Après un premier mandat (2006-2010) achevé avec une popularité record, l’ex-présidente socialiste n’avait pu immédiatement se représenter, la Constitution interdisant d’exercer deux mandats consécutifs. Elle avait alors été nommée directrice exécutive de l’Organisation des Nations Unies Femmes, où elle a pu, à New York, étoffer son bagage diplomatique. Rompant avec le style figé de la classe politique traditionnelle, la présidente s’était fortement engagée en faveur des droits des femmes dans un pays ultraconservateur, où l’avortement est interdit et où le divorce n’a été légalisé qu’en 2004.