« L’organisation du 16^ème sommet de la francophonie organisé à Antananarivo a demandé la création de nouvelles infrastructures qui n’existaient pas auparavant. Le village de la francophonie, « le cœur battant du sommet », en est l’exemple. Celui-ci accueille des dizaines d’exposants, a représenté une source importante d’emplois pendant la construction et se veut désormais un lieu durable, dont la population pourra profiter après le sommet ». C’est là la description officielle du Village de la Francophonie qui commence à attirer de plus en plus de visiteurs au fur et à mesure que le sommet avance. Un beau village au cœur d’une ville qui, en une semaine, fera également plus de recette que la capitale elle-même dans la collecte des taxes et impôts qui lui sont dues. En une semaine, ce même village aura suscité plus d’engouement que le parc botanique et zoologique de Tsimbazaza ne pourrait faire en un mois, voire en un trimestre entier. La raison, elle est toute simple, c’est tout simplement un beau village, bien moderne et non comme celle qu’on a l’habitude de voir lorsqu’on va à la campagne. On ne croirait pas qu’on se trouve encore à Antananarivo en 2016, plutôt à Antananarivo en 2096.

Une fois franchi les scanners à l’entrée, on se trouve, en effet, projeté dans quelques années, dans un futur encore inimaginable pour la capitale malgache. Non pas du fait que les nouvelles technologies sont là, ou bien que des voitures volantes envahissent maintenant nos rues. Dans le village, on reconnait encore la ville des mille où se mêlent les artisanats en tout genre, et toutes ces autres caractères qui font d’Antananarivo ce qu’elle est et n’ont jamais changé au fil des années. La première chose qui donne au Village Voara sa splendeur est sans doute son style urbain et son aspect neuf. Une chose qu’Antananarivo n’a jamais réellement eu malgré son statut de capitale, et ce qui conforte encore le fait que dès le portail franchi, on se retrouve dans un futur qu’on espère proche. Les bâtiments, l’animation dans le village qui le rend vivant et moins lassant que l’habituelle capitale. C’est là la première chose qui rend ce village beau. En second, c’est sans doute le fait qu’on ne remarque plus aux alentours la réalité qu’est la nôtre. Pour 2000 Ariary, ce n’est pas cher payer d’oublier pour un moment les séances de délestage auxquelles ont droit les habitants de la capitale qui, contrairement au village, n’est pas le cœur battant de la Grande île, en tout cas pas en ce moment. Ce n’est pas cher payer pour échapper un instant à la pollution, aux embouteillages et aux galères pour se trouver une place de parking. Oui,  car au village, l’air est purifié et la climatisation marche à merveille, comme ce sera le cas pour Antananarivo en 2096. Bien loin donc de la vraie vie à Antananarivo que sans doute les tenants du pouvoir se sont évertués à cacher aux yeux des quelque 6000 invités prévus pour le Sommet.

Mais vous connaissez le dicton, « chassez le naturel, il revient au galop ». Après à peine trois jours d’activités, les mœurs et habitudes d’Antananarivo ont fini par atteindre le beau village Voara. En effet, si à l’inauguration on avait constaté la propreté naturellement, la fraîcheur et l’harmonie, hier, le village était méconnaissable. Bien sûr, les installations et les infrastructures étaient encore là, mais les ordures, les papiers et sachets ont commencé à  fleurir le long des avenues du village tout beau tout neuf. Une manière peut-être de rappeler que le village se trouve au cœur de la capitale et doit donc être rattaché à elle par les caractéristiques, comme un genre d’Adn. Finalement, il a fallu trois jours pour que le village en question perde sa magie. Et malgré ces personnes qui s’empressent aux portes du beau village, celui-ci ne retrouvera sans doute plus sa splendeur. Car une fois le sommet de la Francophonie terminé et les invités repartis chez eux, personne ne s’en souciera plus. A l’intérieur comme à l’extérieur du village, les jardins serviront de chemins de raccourcis, les ordures qui jonchent le sol ne seront plus nettoyées et enlevées. Village oh mon beau village, que deviendras-tu ?

Ny Aina Rahaga