Limitation de l’immigration – La Suisse s’attend au retour de bâton de l’UE
Le référendum en faveur d’une limitation de l’immigration organisé dimanche par la droite populiste a recueilli 50,3 % des voix. Une courte majorité, mais suffisante pour mettre un terme à la libre circulation conclue avec Bruxelles. La victoire des nationalistes est incontestable, mais ce vote risque d’avoir des conséquences négatives. La Suisse n’avait sans doute pas besoin de cette nouvelle source d’affrontement avec l’Union européenne. Après les dossiers brûlants et toujours en attente des banques et des affaires fiscales, la voilà confrontée à un problème supplémentaire susceptible d’empoisonner ses relations avec l’Union européenne. Le ministre suisse des Affaires étrangères, Didier Burkhalter, va dès ce lundi prendre le chemin des principales capitales, en commençant par Berlin, pour tenter d’apaiser la mauvaise humeur de ses partenaires. Les réactions au scrutin ont en effet été des plus sévères. Des accords bilatéraux existants sur l’agriculture, le transport ou la recherche par exemple, sont d’ores et déjà sur la sellette. Le résultat sur le référendum a jeté un froid et Berne s’attend à ce que ces négociations en cours marquent le pas et pour bien longtemps. Les changements sur le terrain n’interviendront donc pas du jour au lendemain. Les étrangers qui travaillent et habitent en Suisse, comme les frontaliers qui traversent chaque jour la frontière ne seront pas touchés. Seuls les éventuels nouveaux venus seront concernés par les restrictions à terme. Par-dessus tout, la Suisse redoute de Bruxelles qu’elle invoque la clause guillotine qui signifierait à peu de choses près, une rupture de la coopération et une totale remise à plat des relations. Le gouvernement suisse est dans l’obligation de préparer une loi d’application des nouvelles normes touchant à l’immigration. Il va s’y résoudre, en essayant malgré tout de sauver la voie bilatérale.
Donnant-donnant
La Commission européenne a fait savoir de son côté qu’elle regrettait le résultat du scrutin. Elle indique qu’elle examinera les implications de cette initiative sur ses relations avec la Suisse, à commencer par la remise en cause de l’accès de la Suisse au marché intérieur européen, comme l’explique le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères,Jean Asselborn, c’est du donnant-donnant : « Il y a une logique très importante !, explique-t-il. D’un côté la libre circulation des citoyens de l’Union européenne, d’un autre côté, l’accès privilégié au marché intérieur qui a été accordé à la Suisse. Les deux sont liés : une ne va pas sans l’autre. Je pense qu’en Suisse, chaque troisième franc suisse est gagné par le marché avec l’Union européenne. Ce qui, entre nous, aura certainement des conséquences directes ou indirectes sur l’emploi aussi en Suisse ». « L’Union européenne n’est pas une organisation qui refuse toute négociation, insiste Jean Asselborn. Mais ici, il faut être clair, la liberté de circuler des citoyens européens ne peut être bradée. Cet accès privilégié au marché intérieur européen avec comme contrepartie la liberté de circulation des citoyens de l’Union européenne. La balle est dans le camp des Suisses. Si effectivement cette libre circulation est remise en cause, beaucoup de choses seront remises en cause. Je ne vais pas aujourd’hui jusqu’à dire que Schengen va tomber, que toute relation avec le marché intérieur va tomber, mais les risques existent ! » Cette votation est un nouvel exemple de démocratie directe, un exemple rare à travers le monde, car c’est le peuple suisse qui a le dernier mot. C’est l’approche du camp des vainqueurs du scrutin d’hier, dimanche. Les nationalistes ont beau jeu de répéter à l’envi que la Suisse est bien le seul pays à consulter directement son peuple en ces matières et que la confédération donne l’exemple. Un exemple que devraient suivre, à leurs yeux, les autres gouvernements. Et ils se plaisent à laisser entendre qu’ailleurs une réponse similaire serait, sans coup férir, donnée.