Travail – Le nombre de chômeurs dans le monde devrait augmenter de 3,4 millions en 2017
Selon les prévisions de l’Organisation Internationale du Travail (OIT), l’économie mondiale devrait enregistrer une croissance modeste de seulement 3,4% en 2017 et de 3,6% en 2018, après avoir atteint en 2016 son plus bas niveau depuis 6 ans (3,1%). Mais derrière ces chiffres, quelles sont les prévisions de l’OIT en termes d’emplois ?
Ce que l’on peut dire, c’est qu’elles ne sont pas vraiment bonnes ! La mauvaise croissance économique de 2016 et la baisse perpétuelle des prévisions d’évolution laissent planer de fortes inquiétudes sur les perspectives de créations d’emplois.
3,4 millions de demandeurs d’emploi supplémentaires
Ainsi, selon l’OIT, le taux de chômage demeurera élevé à court terme alors que la population active continue d’augmenter : il devrait s’établir à 5,8% en 2017 (contre 5,7% en 2016). L’année 2017 verra ainsi arriver 3,4 millions de demandeurs d’emploi supplémentaires sur le marché du travail.
+3,6 millions de chômeurs dans les pays émergents
Pourquoi cette hausse ? Elle proviendra essentiellement d’une dégradation de la situation du marché du travail dans les pays émergents ayant connu une forte récession en 2016 et qui se poursuivra en 2017. Dans ces pays, le nombre de chômeurs devrait augmenter de 3,6 millions et le taux de chômage atteindra 5,7% en 2017, voire plus (8,4%) dans certaines zones géographiques où la situation est particulièrement critique comme en Amérique Latine et aux Caraïbes, en particulier au Brésil qui a vu son nombre de demandeurs d’emploi augmenter.
En Europe et en Amérique du Nord, le taux de chômage « longue durée » reste élevé
Le nombre de demandeurs d’emploi devrait cependant reculer dans les pays développés (- 670 000) pour atteindre un taux de chômage de 6,2% en 2017 contre 6,1% en 2016. Le chômage conjoncturel – lié à la croissance économique – continuera de baisser dans le Nord, le Sud, l’Ouest de l’Europe ainsi qu’au Canada et aux Etats-Unis. Cependant, le chômage structurel – lié à des changements de la structure économique d’un pays amenant une inadéquation entre l’offre et la demande – va en s’aggravant. Pour de nombreux pays émergents et en développement, le problème majeur et récurrent reste la mauvaise qualité de l’emploi.
Europe et Amérique du Nord connaissent un taux de chômage longue durée élevé par rapport à son niveau d’avant crise, et ce taux en particulier a même récemment augmenté malgré la baisse du taux de chômage global en Europe. Au deuxième trimestre 2016, plus des deux tiers des chômeurs de longue durée soit 6 millions de personnes l’étaient depuis plus de deux ans.
Emploi vulnérable, pauvreté au travail, inégalités sociales
Le taux d’emploi vulnérable ne baissera que très légèrement (-0,2%) en 2017 et devrait représenter entre 42% de l’emploi global, soit 1 travailleur sur 2 dans les pays émergents et 4 travailleurs sur 5 dans les pays en développement. Les deux continents les plus touchés par ce phénomène sont l’Asie et l’Afrique Subsaharienne.
Plus de travailleurs pauvres dans les pays en développement
La pauvreté au travail continue d’être un réel problème dans ces deux zones géographiques : près de la moitié des travailleurs d’Asie du Sud et près des deux tiers en Afrique Subsaharienne vivent dans une pauvreté extrême ou modérée (soit 3,10 dollars US par jour en termes de pouvoir d’achat). Mais « les progrès des pays en développement ont été trop lents pour suivre le rythme de la croissance de l’emploi », selon l’OIT, contrairement aux pays émergents qui ont vu leur nombre de travailleurs pauvres décliner rapidement. Ainsi, les pays de développement devraient voir leur nombre de travailleurs gagnant moins de 3,10€ par mois grossir de 3 millions de personnes supplémentaires en 2017.
Les inégalités hommes-femmes persistent
Ces « tendances sociales » cachent des inégalités très marquées entre les groupes démographiques et notamment entre hommes et femmes. En Afrique du Nord, ces dernières ont deux fois plus de chances que les hommes d’être au chômage. Elles sont également surreprésentées dans l’emploi vulnérable en Afrique, en Asie-Pacifique et dans les Etats arabes. Ces inégalités se manifestent également par des écarts de rémunération (40% de différence en Azerbaïdjan et au Bénin par exemple), qui persistent malgré les progrès accomplis par certains pays en matière de législation sur cette question.
Dans ce contexte mondial incertain, le risque de troubles sociaux et de mécontentement s’est aggravé partout, particulièrement dans les pays arabes. Le manque de possibilité d’accéder à un travail décent fait partie des raisons qui poussent les habitants d’un pays à émigrer.
Quelles solutions face à cette tendance mondiale ?
«Nous sommes confrontés à un double défi : réparer les dommages causés par la crise économique et sociale mondiale et créer des emplois de qualité pour les dizaines de millions de personnes qui arrivent chaque année sur le marché du travail», explique Guy Ryder, le Directeur général de l’OIT.
Pour l’Organisation, il est urgent d’adopter des politiques permettant de « lever les obstacles structurels à la croissance » et de faire reculer les inégalités. Encore faut-il trouver le bon dosage de mesures. Un accroissement de l’investissement public et des mesures de relance budgétaire donneraient, selon l’OIT, « un coup de fouet immédiat » à l’économie mondiale – en tenant bien sûr compte des possibilités budgétaires de chaque pays. Mais pour cela, une coopération internationale est nécessaire.
A court terme, ce type de mesures pourraient réduire le chômage total de 0,7 million en 2017 et de 1,9 million en 2018 par rapport aux estimations. A moyen terme, elles auraient des effets positifs sur les investissements, dissipant les craintes et favorisant la demande. Mais difficile de prédire les effets qu’auraient ces mesures à long terme sur la croissance économique. A charge de l’OIT de mesurer les conséquences de ces mesures et des évolutions technologiques et structurelles qui vont avec, dans le cadre de sa réflexion sur l’avenir du travail.