Electrification – « Comment garantir un avenir radieux à l’énergie solaire en Afrique ? »
Deux consultants alertent sur l’intermittence qui caractérise la production d’électricité solaire ou éolienne. Et ce, pour éviter que le « miracle » attendu ne vire au fiasco.
L’Afrique et la France ont un point commun en ce début d’année : leur difficulté à répondre à la forte demande en électricité. Si le froid est à l’origine de cette tension dans l’Hexagone, c’est plutôt le manque de capacité de production qui justifie ce déséquilibre offre-demande en Afrique subsaharienne – sa capacité installée représente un tiers de celle de la France.
Comme le dit l’adage sur le continent, « le soleil n’oublie jamais un village, même s’il est petit ». L’ensoleillement exceptionnel dont bénéficie le continent et la présence d’espaces encore vierges font de l’Afrique une terre idéale pour le solaire. Grâce à une technologie désormais bien maîtrisée, des coûts de développement compétitifs (divisés par quatre en moins de cinq ans) et des délais de construction records (douze mois), le solaire se déploie rapidement et permet de produire de l’électricité à des coûts inférieurs de moitié à ceux des vieilles centrales thermiques.
Une énergie renouvelable mais intermittente
La course aux projets est lancée. Les Etats accueillent à bras ouverts les producteurs indépendants d’électricité et l’Agence internationale de l’énergie (AIE) prévoit que, d’ici à 2030, le solaire pourrait représenter 14% de la puissance installée en Afrique. Le Sénégal fait figure de précurseur avec l’inauguration de la plus grande ferme solaire d’Afrique de l’Ouest. D’une puissance maximale de 20 MW, Senergy 2 fournit à la Sénélec un kilowattheure à moitié prix par rapport à l’existant.
Il convient pourtant d’être prudent, car il reste un défi majeur : celui d’intégrer une énergie certes renouvelable, mais qui demeure intermittente, au sein d’un réseau électrique tolérant mal l’instabilité. Les pays les plus avancés fixent ainsi un seuil de sûreté qui limite la part d’énergies intermittentes (solaire, éolien) dans leur bouquet énergétique. Il est de 30% à La Réunion, pourtant pionnière en matière d’énergies renouvelables.
Le défi est de taille
Les annonces de mégaprojets solaires on-grid (« sur réseau ») sur le continent doivent donc être prises avec précaution. Le Nigeria, qui a signé à l’été 2016 des contrats pour plus de 1,1 GW de projets solaires (25% de la pointe de consommation), est-il bien préparé à intégrer ces sources intermittentes sur son réseau ? Le black-out complet observé en 2016 dans l’Etat d’Australie méridionale (dont 45% de l’électricité provient de sources intermittentes) doit faire réfléchir.
Le défi est de taille pour les Etats africains, les enjeux étant techniques mais aussi financiers. Derrière chaque projet solaire privé se trouve un contrat garantissant l’achat par l’Etat de l’électricité produite, à un prix fixé à l’avance, souvent en « take or pay ». Si les réseaux ne sont pas capables d’absorber la production de ces centrales, la soutenabilité de ces contrats pourrait se poser pour les Etats, comme leur viabilité à terme pour les industriels.