Papa où t’es ?
Le Sud a de nombreux surnoms dont l’un d’eux est quasiment une insulte à sa population : cimetière de projets ! Les intellectuels de la région, les régimes successifs, les organisations non-gouvernementales nationales et internationales, les businessmen, et même les artistes ont œuvré durant des décennies pour le développement du Sud sans qu’on ait pu effacer la pauvreté extrême de la population locale. Durant la deuxième République avec son slogan « investissement à outrance », le Sud a aussi vu naître une ribambelle d’entreprises et de sociétés d’Etat telles que SUMATEX ou SOMASUD, l’entreprise Avotse… Pourtant, l’ancienne province de Tuléar est réputée regorger de richesses naturelles. Outre l’ilménite exploitée par QMM, le géant thaïlandais Pana Africa Mining (PAM) est prêt à démarrer l’exploitation du gisement de charbon de Sakoa et convoite une concession d’uranium d’une surface de 10 000 km2 à Amboasary-Atsimo. La meilleure labradorite du monde est malgache et la réserve se trouve à quelques dizaines de kilomètres de Benenitra, une des localités les plus pauvres de la province. Bizarrement, l’Etat est impuissant face à l’exportation à l’état brut de ce minéral destiné à la joaillerie, richesse unique au monde ! On se rappelle aussi, et entre autres, de la découverte de la spiruline dans la région d’Atsimo-Andrefana, un aliment riche en protéine à très haute valeur nutritive qui depuis quelques années, entre dans les habitudes alimentaires de la population tananarivienne. Mieux, la zone humide du delta de la Mangoky alimente en produits halieutiques dont poissons et crabes, les villes d’Antsirabe et d’Antananarivo ! Et ce ne sont que des exemples parmi tant de milliers. D’un autre côté, ce ne sont pas les personnalités qui ont joué de grands rôles politiques et économiques qui manquent à cette province. Récemment, deux fils de Tuléar ont été nommés Premier Ministre, Monja Roindefo et le Général Camille Vital, ou encore le célébrissime Maharante Jean de Dieu, un magistrat nageur qui a réalisé jusqu’ici l’honorable score d’être présent dans deux Républiques et une Transition. Le Sud n’est donc pas uniquement une terre aride où le manque de précipitation et les difficultés d’alimentation en eau entraînant l’inaccessibilité des produits alimentaires sont des problèmes répétitifs. Mais actuellement, le Sud fait face aussi et surtout à des « dahalo » possédant des armes de guerre, sans pitié, ni foi, ni loi. Malheureusement pour la province, on se fout royalement de ses maux et le choix de l’Etat d’aller secourir et apporter son aide immédiate à l’île de Nosy-Be peut vouloir dire que le Sud peut encore attendre longtemps. C’est le cas de le dire puisqu’il lui faut maintenant attendre la mise en place, rapide soit-elle, et les estimations financières et opérationnelles du Haut Conseil de la Défense Nationale avant qu’une quelconque opération militaire pour mettre fin aux exactions des « dahalo » puisse être menée. Espérons au moins que cela ne s’arrêterait pas uniquement au stade de… projet !
Jean Luc RAHAGA