Réaction négative tous azimuts !
Jamais autant de rejet n’a été constaté pour un projet de loi sur la décentralisation qu’il est vrai, beaucoup l’ont souhaité depuis des décennies. Effectivement, le peuple a exigé une décentralisation effective afin de pouvoir réaliser un réel développement depuis le fokontany jusqu’au faritany, en passant par les communes et régions. Il s’agirait de bénéficier des appuis institutionnels adéquats et adaptés mais aussi des ressources financières qui, à la première analyse, doivent revenir à ces collectivités territoriales. D’où les multiples essais et ateliers de transfert de compétence sans que cela a grandement changé la situation socioéconomique de ces contrées lointaines du regard des autorités centrales. Depuis la dernière Transition jusqu’à aujourd’hui, 8 mois après l’investiture de Hery Rajaonarimampianina qui est le signe de l’instauration de la 4è République, beaucoup ont constaté que ce genre d’atelier de transfert de compétence au profit des communautés locales n’est plus organisé. En réalité, c’est le ministère de l’intérieur et de la décentralisation qui veut s’arroger le droit de découper selon la convenance du parti politique au pouvoir, mais surtout selon sa réelle force et volonté à affronter le verdict des urnes lors des joutes électorales. Le calcul sera donc de diviser pour mieux régner d’autant que dans le projet de loi sur la décentralisation présenté par ce ministère à l’Assemblée Nationale, le fokontany, principale administration la plus proche de la population, ne reçoit aucune considération. Les attributions, le fonctionnement et les compétences des maires, les vrais de vrais sont les mêmes que ceux définis dans la loi actuelle si, pour la Capitale de Madagascar, les « maires d’arrondissement » ne feront que de la figuration et n’auront comme tâches que celles relatives à l’Etat-civil ! Pire, ces derniers ne seront pas des ordonnateurs principaux, ni secondaires d’ailleurs au sein de leurs arrondissements respectifs et ne s’occuperont pas ni de l’urbanisme, ni des marchés, et même pas des blocs sanitaires et autres bornes fontaines. Bref, ils seront rien du tout, juste des sous-fifres bons à signer des actes de naissance ou de décès et utiles pour faire élire le … Président de la Communauté d’Antananarivo.
Mais une chose est sûre, il sera pratiquement impossible pour le HVM de gagner la mairie des grandes et moyennes villes de Madagascar et le pouvoir actuel peut aligner et nommer PDS successivement tous les fils des anciens maires élus à Antananarivo sans que cela puisse faire retourner la situation. Et pourquoi pas les filles, Alain Delon peut toujours faire la cour et « sérénader » pour Madame Sarah Ravalomanana. De même pour Morondava, ville natale du Premier Ministre ou encore pour l’Atsimondrano où un conseiller spécial du Président de la République a essayé de réunir la population de ce vaste district pour une adhésion massive au parti présidentiel en distribuant du riz mais finalement, il n’a pu remplir que moins de la moitié d’un stade de foot à …7 !
Pour en revenir à la Capitale, des députés proposent un référendum sur cette question et préfèrent s’en remettre à la décision populaire que de voter, pour ou contre, ce projet de loi. Mais la tendance est déjà connue de tous puisque les députés élus dans la ville des mille sont issus de deux formations : Mapar et Mouvance Ravalomanana. Ces deux entités se sont toutes prononcées à ce sujet et réfutent catégoriquement la division d’Antananarivo en six morceaux d’autant qu’il est tout simplement impensable et inacceptable pour des raisons historiques, culturelles et politiques que cela soit réalisé. A l’heure ou plus proprement à l’ère de la mondialisation et de la globalisation, il est surtout conseillé de se regrouper et de s’unir en prônant le rapprochement entre les hommes pour mieux affronter les défis des grandes villes dont la gestion du flux migratoire, notamment venant du milieu rural, l’urbanisation harmonieuse avec l’environnement d’où le plan vert et autre plan bleu initié dans la capitale, l’accès à l’eau potable, l’assainissement et la gestion des ordures ménagères, le déplacement urbain, la sécurité publique et la protection civile, … Si seulement un de ces thèmes touchant de près la vie de la population a été énoncé et exposé comme motif ayant incité à l’élaboration de ce projet de loi, on aurait pu comprendre que le régime actuel représenté ici par le ministère de l’intérieur et de la décentralisation se soucie effectivement de son peuple et du développement réel de la Nation par l’intermédiaire d’une décentralisation effective. Mais à coup sûr, ces enjeux ne sont pas retenus comme paramètres à maîtriser absolument dans ce projet de loi n° 018/14 du 25 juillet 2014 contenu dans un gros livre de 350 pages. En somme, il s’agit d’un simulacre de décentralisation, une manœuvre dilatoire pour assouvir un besoin de régner coûte que coûte en rendant l’électeur en citoyen de seconde zone puisqu’il ne pourra plus élire directement le premier magistrat de sa ville. Bref, pour un régime de plus en plus haï par la population, à en croire les interventions dans les talk-shows, l’adoption de cette loi signifierait son sabordage, les mille guerriers qui ne meurent pas en un jour se lèveraient comme un … seul homme !
Jean Luc RAHAGA