L’heure de la vérité !
Elle approche à grands pas pour les candidats maires qui se sont montrés au public depuis une quinzaine de jours en battant les pavés, en remontant les cours d’eau mais aussi la pente de la notoriété, en organisant des meetings politiques qui, pour certains, ont fait rameuter la foule et la populace, si pour d’autres, n’ont pu recueillir que les carrés habituels de fidèles composés de membres de leurs familles et de leurs proches vraiment tout près si les voisins ont plutôt préféré tourner les yeux et regarder ailleurs, ou plus précisément d’autres affiches ! Par contre, beaucoup d’entre ces candidats ont pris une certaine longueur d’avance et leur précampagne sont allées de quelques semaines à des années. C’est le cas par exemple de ceux qui voulaient participer déjà aux élections communales et municipales prévues en 2010 mais finalement annulées sous la pression de la Communauté Internationale qui était, à ce moment-là, plutôt occupée à la recherche d’une porte de sortie honorable de la crise de 2009 et en faveur de leur diktat et de leur intérêt. Pour cette dernière, il a été inconcevable qu’un peuple pauvre puisqu’appauvrie durant des décennies puisse se soulever contre les dirigeants de l’époque et qui était à leur solde. Le cas de l’exploitation de l’ilménite de Taolagnaro ou encore de celle du cobalt de Moramanga est toujours là pour nous le prouver et pire, des années plus tard, aucun citoyen de ce pays n’est toujours pas en mesure de connaître la teneur des contrats qui lient la Nation malgache à ces multinationales. Et d’où donc l’annulation de ces élections de proximité de cette année-là !
Pour en revenir aux candidats-maires qui menaient campagne avant la lettre, certains se sont fait rappeler à l’ordre par l’institution chargée de son organisation, la Ceni-T donc. Une prétendante à la mairie de la Capitale a, par exemple, reçu un avertissement pour la simple raison qu’elle a édité une carte de visite sur laquelle a été marquée sa présence dans cette joute électorale. Il a fallu, d’abord, que l’exemplaire de cette carte arrive entre les mains des membres de cette institution et puis par la suite, s’assurer qu’elle a été bien émise par son propriétaire. Soit un travail d’investigation policière dont l’institution en question n’a aucunement le droit de faire. Par contre aussi, personne de la Ceni-T n’a vu les inaugurations et autres événements grandioses organisés au vu et au su de tout le monde – et pire, relayés par les chaînes publiques et autres supports médias -, par le régime en place, alors que cela entrait évidemment dans le cadre des élections à venir. Mieux, c’était lors de ces manifestations que le président de la République lui-même a présenté à l’assistance son poulain pour la mairie d’Antananarivo, alors que tous savent que c’est interdit par la loi.
Après ces douze ou treize jours de propagande, beaucoup estiment que les jeux sont faits et comme on dit, il ne reste que la formalité d’aller voter. C’est aussi le cas pour les indécis qui, finalement, n’existent vraiment pas dans l’électorat malgache. Durant tout ce temps, on a entendu tout ce qu’on voulait entendre et même ce qu’on ne voulait pas entendre. Dans une émission spéciale d’une télévision privée d’hier destinée pour un candidat, on a entendu, par exemple, une litanie de programmes alors qu’on sait que le budget de la Commune urbaine d’Antananarivo arrive tout juste à honorer celui du fonctionnement et pour ce qui est de l’investissement, même la réalisation de la réhabilitation des bornes-fontaines, des écoles primaires publiques, des centres de santé de base, …, – soit le minimum -, est quasiment impossible. Et le candidat de renchérir qu’il compte sur le régime actuel pour faciliter l’exécution de tous ses projets. Il semble oublier que les caisses de l’Etat sont quasiment vides et pour faire fonctionner la machine administrative, le ministre des Finances et du budget a sorti, plutôt mis en application, le décret permettant la ponction de 2 000 ariary sur chaque travailleur gagnant moins de 250 000 ariary, soit 75 euros par mois !
Et que dire de la montée des contestations de ces derniers jours ! Elles dénoncent, bien sûr, les tentatives de fraudes électorales à grande échelle dont le bourrage des urnes, des bulletins uniques pré-cochés, des listes électorales truquées, de l’établissement à l’avance de PV, de l’usurpation d’identité d’électeurs, de la falsification de documents administratifs, et entre autres, des menaces envers la population faites par certains barons du régime. Rappelons aussi les avertissements à peine voilée de la société civile ou encore des Eglises chrétiennes de Madagascar sur une organisation complètement bâclée, désordonnée et tendancieuse. Apparemment, ces élections de proximité vont plutôt accoucher des troubles et tumultes que de la vérité des urnes !
Jean Luc RAHAGA